Millénaire

Un millénaire controversé

La célébration du millénaire d’existence de la Pologne est une nouvelle grande occasion d’opposition entre le régime communiste et l’Eglise.

La veille de Pâques 1966 a lieu le millième anniversaire du baptême du roi Mieszko I, survenu le 14 avril 966. Cette date est célébrée par l’Eglise polonaise en tant que naissance de la Pologne chrétienne et par les autorités athées en tant que fête du millénaire de l’Etat.

Monseigneur Wojtyla écrit pour cette occasion « Vigile pascale 1966 », méditant sur son pays où a été planté l’Arbre blessé, l’Arbre de la Croix du Christ, dans le verger de Mieszko.

« Autour de lui, le verger. Les arbres greffés.
Mieszko s’y promenait à l’ombre, il regardait.
Il ne voyait ni jardinier, ni arbres, ni greffes.
Il pensait : je ne goûterai pas à ces fruits une fois mûrs.
Mon fils y goûtera, ses fils et ses petits-fils.
La récolte du verger sera-t-elle bonne ?
Quel fruit y trouvera-t-on à son goût ?
Le jardinier ne craint pas d’inciser l’écorce.
Il se fie à l’arbre : la vie, plus forte que la plaie,
prendra vigueur nouvelle. (…)

Moi-même, que je me regarde comme un tronc.
A travers moi aussi croît l’ARBRE BLESSE. (…)

J’ai compris : l’arbre doit être blessé
pour que la vie s’y implante. (…)

L’ARBRE disait :
Ne crains rien quand je meurs
– ne crains pas de mourir avec moi.
Ne crains pas la mort – vois, je revis.
La mort n’a touché que l’écorce.
Ne crains pas de mourir avec moi pour revivre.
Le signe se cicatrisera.
En lui tout mûrira de nouveau –
le fruit ne tombera plus de son propre poids.
L’ARBRE rendra ses fruits à Celui qui le greffe –
vous mangerez les fruits qui mûrissent sur Moi,
sur Moi, l’Arbre blessé. (…)

Mieszko marchait sur les sutures, souvent avec crainte :
mais ce n’était pas que par crainte
qu’il présentait des offrandes aux dieux –
ni seulement pour faire pencher la balance.
Tandis qu’il cherchait les dieux
dans les sutures du monde et dans les inconnues du destin,
tandis que, dénombrant les dieux,
il prononçait leurs noms en tremblant
(leurs plus anciens noms dans la langue des pères)
il devenait clair que Dieu n’est
ni dans les sutures du monde
ni dans les méandres du destin de l’homme
mais qu’il parle sa propre langue,
celle de la droiture absolue.

La droiture de Dieu passa
au travers des sutures du monde (…)

Appelons baptême ce moment précis
(où Dieu surgit des sutures du monde,
des méandres du destin de l’homme)
où il parle à Mieszko, où Mieszko peut lui répondre. (…)

VIGILE PASCALE 1966
Il est une Nuit où, veillant près de ton sépulcre,
plus que jamais nous sommes l’Eglise,
c’est la nuit où se battent en nous
le désespoir et l’espérance :
cette lutte se superpose à toutes celles de l’histoire,
les sature jusqu’au tréfonds.
Y perdent-elles leur sens ? l’y trouvent-elles ?
Nuit où le rite de la terre se rejoint à son commencement,
mille ans sont une Nuit : veillée à ton sépulcre. » (OEU PT)


Références :
Jean Paul II – Témoin d’espérance, George Weigel, Editions Jean-Claude Lattès, 2005
OEU PT : Poèmes, théâtre, écrits sur le théâtre, Karol Wojtyla, Editions Cana/Cerf, 1998

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